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JUL, l’anti-héros du rap français à la cape de platine

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JUL

Artiste de tous les records en 2016, JUL est pourtant boudé tant par les médias que par les fans de rap. Comment peut-il alors à ce point exploser les scores ?

600 millions de vues sur Youtube, 110 000 albums écoulés après seulement deux semaines d’exploitation, 600 millions d’écoutes streaming sur les grandes plateformes : JUL est indéniablement le monstre musical de 2016. Pourtant, si vous cherchez son interview dans les médias, vous peinerez à la trouver. Si vous en parlez à un puriste de rap, vous vous ferez copieusement insulter. Si vous l’écoutez dans votre voiture au feu rouge, les gens vous dévisageront d’un regard circonspect derrière leur vitre. Bref, JUL, c’est un peu le Trump de la musique française : il trône en haut des charts, mais quand on creuse un peu, personne ne semble l’écouter.

L’anti-héros du rap français à la cape de platine

« J’écoute ça pour rigoler » vous dit votre pote qui vient de mettre « Tchikita » sur son enceinte, comme si le rappeur marseillais était une contre-mode qu’on écoute honteusement. JUL c’est l’anti-héros d’un rap français en recherche d’identité qui tape du million de vues en jogging de Chelsea. En fait, c’est un peu le Monsieur Tout-le-monde qui a percé, celui qui n’a pas de réel talent d’écriture mais qui se défoule et s’éclate en studio. « Ce qu’il fait, tout le monde peut le faire » poursuit votre pote. Ah bon ? Mais alors pourquoi personne n’a jamais essayé ? Pourtant, avec un disque d’or en une semaine, le business est alléchant.

Ainsi, qui sont donc ces 60 000 personnes qui se sont arrachées l’OVNI dés sa première semaine ? Des fans incontestables qui restent dans l’ombre du lynchage médiatique que subit le rappeur sur les réseaux sociaux. En vérité, JUL est devenu une jauge en terme de médiocrité selon les puristes. « On dirait du JUL«  : c’est vraiment de la merde, un rap souvent autotuné qui s’axe plus sur la mélodie que sur le fond des paroles. « Ca change de JUL » : pas mal mais peu mieux faire, le débat reste ouvert, toujours selon les puristes. « Retournez écouter votre JUL » : le commentaire hautain d’un prétendu fan de rap qui chie sur la tolérance musicale pourtant essentielle dans le milieu. Sincèrement, ne pensez pas que les fans de rap sont ouverts et simples d’esprit, bien au contraire : à chaque tentative de fulgurance artistique, un coup de fouet critique est asséné au rappeur qui s’extirpe des mœurs initiales.

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Une recette par l’omniprésence

Pourtant JUL a réussi là où tant d’autres ont échoué : la régularité et la création d’un style de rap propre. Depuis 2014, JUL c’est 11 albums, dont trois gratuits et une édition collector. Un rythme fou, quasi un opus tous les 3 mois sans compter les innombrables singles et ses featurings. Un monstre de travail tout simplement, certes pas toujours rempli d’originalité mais qui fonctionne à chaque fois. Dans le secteur ultra concurrentiel qu’est le rap, l’omniprésence est essentielle sans quoi vous serez très vite supplanter par d’autres rappeurs. Il suffit juste de regarder l’énorme flopée de rappeurs émergents en 2016 : MHD, SCH, PNL, Damso… Rester muet trop longtemps dans le rap, c’est prendre le risque d’être oublié.

JUL a parfaitement compris ce business et c’est ce qui plait aux fans : la nouveauté, tout le temps la nouveauté, toujours la nouveauté. Inutile de préciser aussi que les fans de JUL l’écoutent sans se prendre la tête, rien qu’à voir la réaction qu’on écoutait plus haut, « J’écoute JUL pour rigoler« . Bien sûr, personne n’écoute JUL pour le message ou pour relater des problèmes sociaux sinon on irait écouter Kery James. On l’écoute parce que c’est frais, ça détend et c’est pour ça que les paroles ne deviennent que secondaires, voire tertiaires.

Un paradoxe entre hypocrisie et rap

Le principal argument contre le rappeur marseillais c’est sa suffisance lyricale, le fait que ses textes soient en général pauvres. J’aime beaucoup ces personnes qui m’expliquent que JUL, c’est de la merde et qu’il dit de la merde, avant de m’inviter à aller écouter tel ou tel artiste américain. Là je dis bravo, car en effet c’est plus difficile de discerner la matière fécale quand on ne comprend pas les paroles. Osez me dire que les musiques festives des années ’80 et que la plupart des chanteurs de variété ont des textes plus riches que JUL ? Je peine à y croire.

Ce qui dérange vraiment, c’est que JUL soit un rappeur, qu’il prétende faire du rap et ça, les fans ne le digèrent pas. Un fan de rap ne peut pas supporter qu’on inclut JUL dans un panier comprenant Lino, Oxmo Puccino ou MC Solaar. Mais ça tombe bien : il n’est pas dans ce panier. JUL c’est un autre style de rap, complètement novateur et récent qui va chercher à faire danser son auditeur avant de lui faire prendre conscience. En somme, un peu à la manière d’un Pitbull ou d’un Sean Paul aux textes pauvres mais à la grande qualité musicale.

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N’oubliez pas que JUL réalise lui-même l’intégralité de sa production, donc si « tout le monde peut faire du JUL » je demande à voir. On pourrait appeler ça du rap beaucoup plus mainstream, et depuis qu’il a incorporé ce style au rap, Booba s’y est mis, Alonzo s’y est mis, Kaaris s’y est mis etc, et pas toujours avec succès. JUL, c’est vraiment l’OVNI du rap français, celui qui ne s’est pas plié au rap, mais qui a plié les codes du rap à son souhait. Celui qu’au fond, tout le monde jalouse parce que son succès reste incompréhensible. Celui qui s’en fout, qui avance mais qui ne laisse aucune miette à la concurrence.

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