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[Leçon de rap #1] Qu’est-ce que le « vrai rap » ?

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Principe péjoratif né en même temps que le « mauvais rap », cette notion émet une définition plurielle en fonction de l’auditeur.

Pour que le terme de « vrai rap » ait été inventé, il est évident qu’il existe un rap jugé factice, ou mauvais. Cependant, afin de définir ce qu’il est vraiment, un petit retour historique est nécessaire. Chaque style musicale qui émerge connaît une ascension et un « boom »  particulier. Alors que ce style se diffuse rapidement selon des codes précis, certains vont les détourner, afin d’apporter une touche plus personnelle et une valeur ajoutée à leur musique.

Leçon de rap - vrai rap

D’abord phénomène antisystème, le rock s’est peu à peu soumis aux règles commerciales de l’industrie musicale.

De ce fait, l’histoire du rap admet de nombreuses similitudes avec le rock. D’abord phénomène culturel emmené par un message profond, le rock s’est éclaté en plusieurs particules : du grunge à l’électronique en passant par l’indie. C’est pourquoi, un style qui regroupait des individus autour d’un même mouvement culturel s’est fracturé, laissant échapper des litiges au sein même de ce mouvement. Le rap suit précisément cette ligne directrice, d’abord ancré à travers la poésie urbaine, celui-ci s’est émancipé jusqu’à fusionner avec différents genres. Souvent, ces genres sont assez proches et logiques – soul, gospel, funk -, d’autres fois, ils le sont moins – électronique, house, club, et contredisent ainsi l’esprit initial.

Le rap, c’est rythm & poesy

Le « vrai rap », c’est souvent ce rap étiqueté old school, parce qu’il respecte les codes originels : rythm & poesy. Celui-ci qui esquive toute fioriture, on respecte la structure de base : deux ou trois couplets parfaitement construits et un refrain sans extravagance. L’instrumentale, quant à elle, se compose principalement de charleston, caisse claire, basse et, si possible, un sample de piano ou de violon. La plupart des premiers gros succès de rap suivent ce concept : IAM, Lunatic etc.

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Aujourd’hui, très peu de rappeurs se limitent à cette recette, on pourrait citer Hugo TSR, même s’il ne se cantonne pas à celle-ci. En soi, même le rap old school a évolué : on ose des refrains chantés ou des mélodies. Les beats aussi se modifient avec le temps, les basses sont toujours plus importantes tandis que les simples instrumentales au piano ont quasiment disparu.

Cependant, la plus grande évolution se retrouve dans le flow. De loin, le flow a supplanté la qualité du texte, jusqu’à la déclasser au second rang. Evidemment, on peut avoir de bons textes et de bons flow, mais de manière générale, ce dernier reste le plus important. C’est ainsi que dans l’expression « rythm & poesy », la poésie s’est peu à peu effritée.

Une frontière illégitime

Si on considère que le vrai rap c’est celui qui s’applique aux codes originels, qu’en est-il du reste ? En effet, peut-on définir de rap, une musique qui ne suit pas l’expression même de rythme et poésie ? Il semblerait que oui, au même titre qu’on peut définir de rock, des morceaux qui s’écartent des barrières d’origines. De ce fait, le rap englobe une flopée de styles musicaux : le rap rock, le rap funk, le rap house, le rap gospel etc. On est ainsi confronté à une multitude de styles, dans lesquels se retrouve le rap old school.

Le problème, c’est que le terme de « vrai rap » varie en fonction de chacun. En prenant en compte un auditeur français, et c’est ce qu’on définissait, le vrai rap, c’est le rap « à l’ancienne », l’underground, qu’on retrouve souvent chez les rappeurs indés. Mais force est de constater que le rap se fait vieux, et qu’en fonction de la génération, les références s’opposent. Par exemple, d’autres fans vont expliquer que, pour eux, le vrai rap, c’est Lacrim, Kaaris ou Niro : ces rappeurs qui représentent une mentalité, un style de vie. D’autres enfin vous citeront Nekfeu ou Orelsan, par leurs genres particuliers.

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Et c’est ce qui fait la beauté du rap : sa pluralité. Chacun fixe ses critères de « vrai rap » selon ses choix. Si on parlait d’abord des codes originels sur la forme, le fond doit lui aussi transvaser une certaine idéologie. Et c’est ce que l’on a brièvement évoqué : la mentalité. Celle-ci doit s’assumer souvent antisystème et laisser paraître un message. Souvent, les rappeurs font l’éloge de la weed, se placent contre les flics et dévoilent des messages de tolérances ethniques. Le fond et le contenu des textes, c’est ce qui dans 100% des cas définit le vrai rap. Vous pouvez avoir une instrumentale et un style des plus puristes, en rappant n’importe quoi, personne ne vous reconnaîtra.

La démocratisation du rap pour sa perte

Cependant, le rap a connu une formidable expansion ces dernières années. De ce fait, une musique jugée presque autarcique par les médias a pris d’assaut les radios jusqu’à les assouvir. En France, une bonne partie des références musicales actuelles sont des rappeurs – Soprano, Maître Gims, Black M. Ce sont précisément eux qui décrédibilisent le rap, en lui retirant sa splendeur antisystème, et ses codes initiaux. Souvent, ces musiques démunies de message affichent une réelle contradiction avec l’esprit du rap.

C’est ainsi qu’a émergé le rap dit « commercial », qui se montre à l’encontre même de ce qu’est le rap. Les fans de rap pur se braquent désormais vis-à-vis de ces rappeurs, et cette hostilité a poussé certains d’entre eux à souligner ce qu’était le vrai rap. Mais la frontière est souvent étroite et personne ne peut s’approprier le monopole pour définir qu’est-ce qui est « rap » ou « pas rap ». Si les codes et les critères varient en fonction de chaque personne, il est normal que le rap puisse varier à son tour. De toute manière, le rap commercial ne supplante pas les autres styles de rap. Médiatiquement certes, son ampleur est plus grande, mais les autres genres sont tout aussi bien représentés. Il suffit de chercher ce que l’on aime, et d’ignorer ce que l’on aime pas.

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