Suivez-nous

Grands Formats

Les grandes figures du Rap de Détroit

Publié

le

détroit

Autrefois ville fleurissante, Détroit est aujourd’hui dans une situation délicate. Endettée jusqu’au cou, la ville n’a plus grand chose pour briller. Heureusement pour elle, la créativité et notamment la musique sont toujours là, avec pour plus fidèle représentant le Hip Hop. Petit tour d’horizon.

18 milliards de dollars de dette, 36 % de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, 40 % de lampadaire en panne : aujourd’hui Détroit n’est plus que l’ombre d’elle même. Car si la ville était promise à un grand avenir dans les années 1920 grâce à son incroyable industrie automobile, elle s’est déclarée en faillite en 2013 suite à 60 ans de déclin où tout s’est envolé. Tout d’abord sa précieuse industrie automobile, délocalisée à l’étranger et dans les États du Sud, entraînant la fermeture d’importantes usines. La plus significative fût l’usine Packard, qui a laissé derrière elle 40 000 emplois et 17 bâtiments à l’abandon, maintenant symboles de l’agonie de la ville.

Les émeutes raciales de 1967 n’ont fait qu’empirer les choses. Ces émeutes sont nées de tensions suivant l’arrivée massive de populations noires venant du Sud, fuyant des Etats encore très racistes et précaires. Ces soulèvements ont créé un départ important de la classe blanche dans des banlieues plus ou moins lointaines, délaissant le centre de la ville, emmenant avec elle les entreprises, et par conséquent l’argent. Tout ceci a causé une véritable chute de la population. De 1,85 million d’habitants en 1950, ils sont aujourd’hui moins de 700 000. Pour ne rien arranger, son légendaire label Motown, véritable machine à tube des années 60 a également migré à Los Angeles en 1971. Et même si Détroit semble sortir un peu la tête de l’eau dernièrement, il reste beaucoup à faire.

Publicité

Avant porté par la Soul et le Rythm & Blues de la Motown, c’est désormais le Hip Hop qui est au premier plan de la ville. Puisant son inspiration dans le passé compliqué de la ville et son histoire musicale riche, le rap de Détroit est unique et possède une identité qui lui est propre. Peu mis en avant dans les charts, le rap de la Motor City est surtout réputé pour sa créativité, créant de nouvelles tendances qui en inspirent bien d’autres. Des pionniers du genre, à ceux qui jouent dorénavant sur le devant de la scène rap, portait des grandes figures du Hip Hop de Détroit.

Esham

Il est vrai que nous avons mis un peu de temps à parler de la scène rap de Détroit. C’est dans les années 90 que les premiers rappeurs de la ville se manifestent, avec notamment Esham. Il n’a que 16 ans quand il sort son premier album Boomin’ Words from Hell. Le monde découvre alors un personnage très sombre, qui sur fond de rock parle de meurtre et de drogue. Véritable précurseur du rap dit Horrorcore, il utilise des paroles qui se rapprochent des films d’horreurs. Les thèmes sont pour le moins violents et les allusions à Satan et aux autres forces du mal y sont omniprésentes.

Âge : 42 ans
Années d’activité : 1988 – 2016
Albums références : Boomin’ Words from Hell, Judgement Day vol 1, KKKill the Fetus.

Kid Rock

Kid Rock, connu aussi sous le nom de « Son of Detroit », sort son premier album en 1990. Écoulé à 100 000 exemplaires, Grits Sandwiches for Breakfast fera acquérir au rappeur une grande notoriété locale, et deviendra vite la plus grande star de la ville avec Esham. Son inspiration du rock des années 70, des Beastie Boys et de Run DMC, lui donnera un style bien unique. Son mélange Rap/Rock/Country sera sa marque de fabrique. Après quelques années plutôt timides, il sera le premier rappeur de Détroit à signer en major, sous le label Atlantic. Ce deal va le faire changer de dimension. En 1998, il sort son premier album majeur Devil Without a Cause. Toujours inspiré du Rap et du Rock, il n’hésitera pas à incorporer du Métal. Acclamé par la critique et vendu à plus de 9 millions d’exemplaires aux Etats Unis, il reste à ce jour son plus gros succès. Bien que très populaire outre Atlantique, son succès restera modéré en Europe. Il sortira 6 albums de 2001 à 2015, délaissant le côté Rap pour explorer plus en profondeur le Rock.

Publicité

Âge : 44 ans
Années d’activité : 1990 – 2016
Albums références : Devil Without a Cause, Cocky

Proof

Connu principalement dans le monde pour être le meilleur ami d’Eminem, c’est surtout lui qui était réputé à Détroit dans les années 90. Animateur des soirées battle au Hip Hop Shop tous les samedis, il était un membre important de l’underground, et jouera un rôle primordial dans la crédibilité de la scène rap de la ville. C’est lui qui était au centre de tous les rappeurs locaux et les mettaient en relation, c’est lui poussa Marshall Mathers à persévérer dans le rap, et c’est également lui qui a formé D12. Voulant 12 rappeurs locaux dans son crew, mais n’arrivant à en trouver que 6, Proof décide alors que chaque membre se créera un alter égo.

Ainsi D12, composé de Proof, Kuniva, Bugz, Mr Porter, Bizarre et Eminem sortent un premier projet The Underground EP en 1997, qui ne fera écho que dans Détroit. Suite à la mort de Bugz, Swifty McVay rejoint le crew pour le remplacer. Suivant le succès de Slim Shady, le groupe sort deux albums studios en 2001 et 2004. De son côté, Proof sort un premier disque en 2004, intitulé I Miss the Hip Hop Shop. Sorti sous son propre label, on retrouve des productions de DJ Premier et de J Dilla. Il sort l’année suivante son deuxième album Searching for Jerry Garcia, où 50 Cent, B-Real et Method Man prêtent leurs voix. Proof meurt en 2006 assassiné dans un club sur la 8 Mile Road, laissant Eminem dans une dépression pendant 3 ans, durant laquelle il faillit mourir d’une overdose.

Publicité

Décès : 32 ans
Années d’activité : 1992 – 2006
Albums références : Devil’s Night (avec D12), Searching for Jerry Garcia

J Dilla

Peut-être plus qu’Eminem encore, J Dilla était le plus grand représentant du rap de Détroit à travers les Etats du pays de l’oncle Sam. Directement inspiré de la musique électronique, il va créer un son tout à fait nouveau et unique. Révolutionnant les techniques de production, Jay Dee utilisera les mêmes boites à rythmes électroniques utilisées pour la techno, elle aussi née à Détroit dans le milieu des années 80.

Samplant des sons disco et assez « robotiques » à l’origine, Dilla va réussir à les rendre plus mélodieux. Ses albums collaboratifs avec Phat Kat et Frank n Dank en sont les parfaits exemples. Il sera membre fondateur de Slum Village aux côtés de T3 et Baatin, qui seront plus tard rejoints par Elzhi. Il sera aussi un acteur important dans l’éclosion du Neo Soul, avec D’Angelo, The Roots, Common et Erykah Badu, qui formèrent le collectif Soulquarians de 1999 à 2002. Le producteur/rappeur décédera en 2006 des suites d’une maladie du sang, 3 jours après avoir sorti Donuts, un des albums les plus influents du monde du Hip Hop. Créé sur son lit de mort, cet album instrumental laissera un héritage considérable.

Décès : 32 ans
Années d’activité : 1993 – 2006
Albums références : Fantastic, Vol. 2 (avec Slum Village), Welcome 2 Detroit, Donuts, The Shining

Eminem

Pur produit de Détroit, il est difficile de parler de cette ville sans évoquer Eminem. Élu artiste de la décennie précédente, il est évident que son émergence en 1999 permettra de mettre sa ville sur le devant de la scène rap au niveau national et mondial, lui qui était au sommet de l’industrie musicale de 2000 à 2003. On retrouve dans ses textes la violence et la misère de la ville. Au talent indéniable, le parcours pour acquérir le respect et la célébrité n’a pas été facile. Seul blanc dans un milieu noir, il sera conspué juste à cause de sa couleur de peau, comme si les émeutes raciales des années 60 le poursuivait.

8 Mile sorti en 2002, film semi autobiographique du rappeur et quasi documentaire, montre la ville sous un angle peu glorieux, et illustre bien les conditions difficiles dans lesquelles la population vit. Premier rappeur de la Motor City à connaître un succès commercial à un niveau national, mais aussi international, il est désormais considéré comme l’un des plus grands. Avant cela, le rappeur était un membre à part entière de la scène underground de Détroit aux côtés de Proof, J Dilla, Elzhi, ou encore Royce. Ensemble, ils ont créé une réputation importante à la ville, qui plus tard fût reconnue comme la référence en matière de battles et de freestyles. Le Hip Hop Shop en témoignera.

Âge : 43 ans
Années d’activité : 1996 – 2016
Albums références : The Slim Shady LP, The Marshall Mathers LP, The Eminem Show, Relapse

Royce da 5’9″

Complice et ami de longue date d’Eminem, le MC a déjà une longue carrière derrière lui. Il a notamment écrit des paroles pour Dr Dre sur l’album 2001. Il sort ensuite en 2002 son premier album Rock City. Depuis 2009, et après la sortie d’autres albums et quelques ennuis avec la justice dû à ses problèmes d’alcool, Ryan Montgomery de son vrai nom s’est assagit, et est maintenant un homme très occupé.

L’homme qui a décidé de devenir sobre en 2012, possède pas moins de 10 projets en 5 ans. Ses albums solos, ses mixtapes, et ses projets de groupe, notamment avec Slaughterhouse (avec Crooked I, Joell Ortiz, & Joe Budden) et Bad Meets Evil (avec Eminem). Très connu pour ses collaborations avec DJ Premier dans le passé, les deux protagonistes décident de sortir un album commun en 2014 nommé PRhyme. Unanimement accueillis par la critique, le projet sera considéré comme étant l’un des meilleurs albums de l’année. En 2016, il revient fort en sortant une mixtape intitulée Trust The Shooter, avant d’enchaîner quelques jours après avec Layers, son dernier album solo.

Âge : 38 ans
Années d’activité : 1999 – 2016
Albums références : Death is Certain, PRhyme (avec DJ Premier)

Elzhi

Elzhi est sans aucun doute l’un des trois meilleurs rappeurs de Détroit avec Eminem et Royce da 5’9″. Fin des années 90, Proof voulait que les trois MC s’assemblent et règnent en rois sur le rap. Malheureusement, l’histoire retiendra principalement Eminem et Royce. Cependant, Elzhi n’a rien à envier à ses anciens partenaires du Hip-Hop Shop.

La carrière d’Elzhi débute avec des projets mineurs qui ne trouveront qu’un petit écho. Ce n’est que lorsqu’il rejoint Slum Village qu’il commence à se faire un nom. Après 3 albums avec son groupe et quelques mixtapes, il sort en 2008 son tant attendu premier projet solo The Leak. L’album est acclamé aussitôt par les critiques et les fans, et devient instantanément un classic de l’underground. En 2011, le rappeur de Détroit se lance un immense défi. Il sort Elmatic, véritable hommage à Illmatic. Le projet (gratuit) a pour but de reprendre les beats de la bible du rap mais avec des instruments live. Will Sessions se chargera de jouer les prod d’une manière remarquable. Après The Leak, Elmatic devient un autre classic unanimement encensé.

Tout semblait sourire au rappeur, c’est sans compter une dépression qui freine son ascension pendant 5 ans, jusqu’en 2016. Il est finalement de retour en mars avec Lead Poison, un opus qui revient longuement sur ses expériences et sa dépression. Une nouvelle fois, l’opus est très bien reçu et Elzhi démontre qu’il n’a rien perdu de ses compétences. Souvent comparé comme l’héritier de Nas, le rappeur de Détroit partage en commun avec la légende de New York une technique d’écriture très narrative et technique. Il fait partie de ces MC qui peignent des images avec des mots. Il n y a plus qu’à espérer une sortie constante de nouveaux projets, qui on en doute pas, seront de qualité.

Âge : 36 ans
Années d’activité : 1998 – 2016
Albums références : The Leaks, Elmatic, Lead Poison

Obie Trice

Signé sous Shady Records en 2000, c’est d’abord par des freestyles et des collaborations qu’il fait ses premières apparitions. De l’album de D12, à The Eminem Show en passant par la soundtrack de 8 mile, tout est fait pour lui créer une voie royale vers le succès. C’est ce qui arrive en 2003, lorsque son premier album studio Cheers est dévoilé. On retrouve des featurings 5 étoiles : G-Unit, D12, Busta Rhymes, Nate Dogg, Dr Dre et Eminem. Ces 2 derniers assureront également une grande partie de la production au côté de Timbaland. Moins mis en avant que son collègue 50 Cent, il n’en reste pas moins une pièce maîtresse de l’ère Shady. Il enchaînera en 2006 avec Second Round’s on Me, toujours produit en grande majorité par Eminem. Cet album n’égalera pas son précédent opus en terme de qualité ou de vente. Il quitte Shady Records en 2008, puis sort 2 autres albums en 2012 et 2015, qui ne connaîtrons pas le même engouement que ces précédents projets.

Âge : 38 ans
Années d’activité : 2000 – 2016
Album référence : Cheers

Danny Brown

Danny Brown est la personnification même de cet héritage Rap/Techno. Ses albums mélangent du rap pur et de la musique électronique, créant des projets expérimentaux acclamés par la critique. Après avoir sorti plusieurs mixtapes, c’est en 2011 que Daniel Dewan Sewell acquiers sa notoriété en sortant son deuxième album XXX. Certains médias qualifieront ce disque comme étant l’album de l’année. Il enchaînera en 2013 avec Old, qui va dans la continuité de son précédent opus. Pleins de contradictions entre le rap hardcore de Esham, l’électronique de Dilla, ou le minimalisme de la techno, on retrouve en Danny Brown une grande partie de l’héritage de la musique de Détroit.

Âge : 34 ans
Années d’activité : 2003 – 2016
Albums références : XXX, Old

Big Sean

Il est sans doute le rappeur le plus connu de la Motor City depuis Eminem. Poids lourd de la nouvelle génération rap, il est signé en 2007 sous GOOD Music, le label de Kanye West avant d’enchaîner 3 mixtapes entre 2007 et 2010. Il sortira ensuite son premier et très attendu album, Finally Famous, puis Hall Of Fame en 2013. Mais sa pièce maîtresse reste Dark Sky Paradise. Dévoilé en 2015, cet opus est à ce jour son plus gros succès, et c’est celui qui lui fera obtenir son premier numéro un dans le fameux Billboard 200.

Âge : 27 ans
Années d’activité : 2007 – 2016
Album référence : Dark Sky Paradise

Apollo Brown

Nouveau producteur très en vogue depuis quelques années, Apollo Brown possède un style qui lui est très reconnaissable, caractérisé par ses fameux craquements de vinyles à chaque début de chanson. Sa magie est de sampler de la soul, de mélanger des mélodies douces, majestueuses, et de mixer le tout dans des drums surpuissants qui vous feront secouer la tête à vous en briser la nuque. Une recette qui fait mouche à chaque fois. Il a déjà collaboré avec Guilty Simpson, O.C. et Ras Kass entre autres.

Âge : 35 ans
Années d’activité : 2007 – 2016
Albums références : Clouds, Trophies (avec O.C.), Dice Game (avec Guilty Simpson), Gas Mask (avec The Left)

Angel Haze

C’est en sortant 4 mixtapes en téléchargement gratuit entre 2011 et 2012 que Angel Haze se fait une réputation. La rappeuse est alors un grand espoir de 2013. Elle confirme cette même année lorsqu’elle dévoile son premier album studio Dirty Gold, porté par les singles « Echelon (It’s My Way) » et « Battle Cry » en featuring avec Sia. Son second album Back to the Woods est sorti en septembre 2015, et nous rappelle qu’il faudra compter sur elle dans le futur.

Âge : 23 ans
Années d’activité : 2011 – 2016
Album référence : Dirty Gold

DeJ Loaf 

Arrivée plutôt discrètement en 2012 avec une mixtape intitulée Just Do It, il faudra attendre 2014 pour la voir au premier plan. Après avoir signé un deal avec Columbia Records, elle sort dans la foulée sa troisième mixtape Sell Sole. Des featurings avec Birdman et Young Thug lui permettrons de faire ses premiers échos dans le monde du rap. Elle apparaîtra la même année sur « Detroit VS Everybody » d’Eminem, single réunissant le gratin du rap de Détroit, à savoir Royce da 5’9, Big Sean et Danny Brown. En 2015, après avoir fait la première partie de la tournée de Nicki Minaj, elle sort son premier EP …And See That’s The Thing, en attendant un premier album qui devrait arriver pour 2016. Son style alternant le rap et le chant en fait une artiste à l’identité reconnaissable. Elle figure également dans le précieux 2015 Freshman Class de XXL Magazine.

Âge : 24 ans
Années d’activité : 2012 – 2016
Album référence : …And See That’s The Thing

Le son de Détroit évolue constamment. De part sa situation géographique, la ville a l’avantage d’être influencée par tous les côtés. De la côte Est à la côte Ouest, en passant par le Sud. Pleins d’autres rappeurs jouent un rôle important dans la ville, maintenant la créativité et l’authenticité de la métropole du Michigan. On pense à Black Milk, le collectif Clear Soul Forces ou le chevronné Guilty Simpson. À l’émergence tardive, force est de constater qu’aujourd’hui la scène rap de Détroit est plus riche que jamais. Plutôt connue pour son inventivité que par sa force commerciale, les rookies sont cependant en train de nous faire mentir et sont promis à un grand avenir. À l’image de Boldy James, autre jeune rappeur récemment signé sous le label de Nas. Et nul doute que Angel Haze, Dej Loaf, Big Sean, et Danny Brown auront leur mot à dire dans les années à venir.

Commentaires

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *