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Découvrez la traduction intégrale de la discussion émouvante entre Eminem et Elton John comme si vous y étiez

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En deux bons amis de longue date, Elton John et Eminem se sont confiés l’un à l’autre dans une conversation téléphonique pleine d’émotion.

A une semaine de la sortie de Revival, Eminem semble fin prêt à revenir sous les feux de la rampe. Alors qu’il vient tout juste de dévoiler le deuxième extrait « Untouchable », le rappeur de Détroit s’est accordé une pause le temps d’une conversation téléphonique avec son collaborateur et ami de longue date, Elton John.

Pour rappel, les deux hommes avaient partagé la scène des Grammy Awawds en 2001, pour un live d’anthologie du morceau « Stan ». Depuis, ils n’ont jamais cessé de se respecter mutuellement, aussi bien en tant qu’artistes qu’en tant qu’êtres-humains. A noter également que le chanteur britannique a grandement aidé Eminem pour lui permettre de surmonter son addiction. De son côté, Eminem, dans un second degré des plus hilarant avait offert à son ami, une paire de sex-toys certie de diamants pour son mariage avec David Furnish.

Une conversation téléphonique inédite qui a donc permis à deux amis rapidement devenus inséparable de s’ouvrir l’un à l’autre sur de nombreux sujets : son nouvel album bien entendu, leur relation si particulière, mais aussi des questions plus polémiques tels que Donald Trump ou encore la situation politique et sociale des Etats-Unis.

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Découvrez la traduction de cet échange émouvant ci-dessous.

Elton John : Salut Marshall !

Eminem : Salut salope, comment tu vas ?

Elton John : Ca va bien espèce de vieux con, t’es à Détroit ?

Eminem : (Rires) Ouai

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Au sujet de son nouvel album, Revival

Elton John : Tu dois être très excité par la sortie de ton nouvel album. Tu peux m’en parler ?

Eminem : Je travaille dessus depuis un peu plus d’un an. Tu sais ce que c’est. Tu fais des chansons et comme tu en créé sans cesse des nouvelles, les anciennes vieillissent et tu les dégages. L’album s’appelle Revival et c’est une réflexion sur où j’en suis maintenant dans ma vie. Mais je pense aussi que sur cet album, j’ai essayé de me diversifier. J’ai essayé de faire un peu de tout pour tout le monde.

Cover de Revival

Souvenirs de leur rencontre

Elton John : Tu es très fort concernant les collaborations. Notre premières rencontre aux Grammy’s quand tu m’as demandé d’interpréter « Stan » avec toi était un événement exceptionnel pour moi. Un moment que je n’oublierai jamais.

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Eminem : Je ne l’oublierais jamais non plus – et j’étais drogué.

Elton John : Tu étais drogué ?

Eminem : Quand on s’est rencontré ? J’en suis sûr.

Elton John : Je ne m’en suis pas aperçu. J’étais complètement hypnotisé par ta performance qui m’a donné des frissons. C’était comme voir Mick Jagger pour la première fois. Je n’avais jamais été confronté à ce genre de performance rap en live. C’était électrisant. Et quand cette connerie s’est abattue sur toi, comme quoi tu étais homophobe, je me suis juste dit, « je ne suis pas là pour ça et ça n’a aucun sens ». Je dois me lever et te défendre. Ce duo au Grammy symbolise le début d’une merveilleuse amitié et je t’en suis reconnaissant.

Eminem : La même, c’était un moment incroyable pour moi. En fait, je ne sais pas si j’étais drogué quand on s’est rencontré, mais c’était à peu près à ce moment-là que j’ai commencé à en prendre

Elton John

Elton John et Eminem viennent d’interpréter « Stan » pour la 43 cérémonie annuelle des Grammy Awards le 21 février 2001 au Staples Center de Los Angeles (Photo MATA/AFP/Getty Images)

Eminem et sa sobriété

Elton John : Tu es clean depuis longtemps maintenant.

Eminem : Ouai, ça fait neuf ans

Elton John : Le jour de ta sobriété retrouvée est inscrit dans mon journal. Tu sais, je suis tellement fier de toi. Je suis sobre depuis 27 ans et quand tu deviens clean, tu vois les choses de manières différentes. C’est bien plus facile de prendre ta vie en main. C’est ce qui fait toute la différence. Je te le dis sincèrement.

Eminem : La sobriété m’a fait grandir. J’ai le sentiment que toutes ces années pendant lesquelles je me droguais, je n’ai pas grandi en tant que personne.

Elton John : Moi aussi. Si j’avais à traverser tout ça pour arriver là où j’en suis aujourd’hui, j’en serais très fier. Mais je n’arrive pas à croire que j’ai fait toutes ces conneries. Enfin bref, parle-moi de ta vie en ce moment plutôt. Tous les artistes d’aujourd’hui son sur Instagram, Facebook, prennent des selfies… Mais toi, tu n’es pas comme ça. Tu vies une vie plutôt simple, tu n’es pas un donneur de leçons. Les gens pensent qu’ils savent tout de toi, mais c’est faux.

Eminem : J’ai beaucoup appris de Dre. Je sais pas si tu peux appeler ça une devise ou quoi, mais il disait « si tu t’en vas jamais, c’est difficile de manquer au gens. Sauf que j’ai l’impression que les gens se disent « Oh, il est sans importance, il est à côté de la plaque maintenant ». Mais je me dis que si je ne m’éloigne pas, je ne me supporterais pas. Je n’ai jamais été du genre à vouloir être sous le feu des projecteurs

eminem Untouchable

Eminem et sa relation avec Dr. Dre

Elton John : Les gens pensent que tu es agressif à cause de ta façon de rapper, mais en dehors de ça, tu es plutôt quelqu’un d’assez timide. M’enfin, retournons à tes débuts à l’époque de The Slim Shady LP. Qui était ta plus grande influence à ce moment-là ?

Eminem : Je pense que c’est Dre. Je me souviens de l’une des premières fois où j’ai rencontré Dre et Jimmy Iovine à Los Angeles dans les locaux d’Interscope. Je n’y croyais pas. C’était une expérience incroyable. Rien n’allait dans ma vie et il m’a sorti de la merde en payant mes factures. Je pouvais enregistrer avec lui. Il y a eu une période où je pouvais rester à écrire pendant 48h non-stop. Je voulais être au top pour Dre parce que je pensais : « si je ne suis pas prêt pour lui, c’en est fini de moi ».

Elton John : Le fait qu’il te valide et t’encourage a dû représenter le monde pour toi. C’est important pour un artiste de ressentir ça pour quelqu’un. ça t’a stimulé je suppose ?

Eminem : Absolument. La première fois qu’on est allé en studio, on a enregistré genre 3-4 morceaux, beat compris, pendant six heures. Je n’avais jamais eu un tel rythme. Les jours suivant, il m’a appris des choses que je ne pensais même pas possible à faire avec ma voix, je pense notamment au morceau « Role Model » quand je dis « You can be just like me »

Elton John : Vous êtes toujours aussi proches aujourd’hui ?

Eminem : Oui.

Elton John : Tu n’oublies pas les gens comme ça. Ca me rappelle ma rencontre avec Bernie Taupin (son plus grand partenaire musical) qui s’est faite par accident. Ce que tu disais à propos de prendre du recul et disparaître un moment, c’est exactement ce que disais Prince, et ce qu’on fait Springsteen et Dylan. Ils ne sont jamais vraiment partis et les gens sont toujours curieux et intéressés par leur travail.

Eminem se livre à une réflexion sur son travail

Eminem : C’est sûr. Il y a des hauts et des bas, je n’ai jamais eu une carrière parfaite. J’ai sorti quelques albums dont je ne suis pas très fier si je regarde en arrière, mais évidemment, il y a beaucoup de choses que j’ai faites et dont je suis très très fier.

Elton John : C’est ça être un artiste. Tu ne peux pas écrire des trucs énormes tout le temps, ce serait inhumain. L’humanité de quelqu’un se mesure parfois dans ses échecs.

Eminem : Tu ne peux pas réussir ton coup à chaque fois. C’est pour ça que quand j’enregistre un album, je fais pas loin de 50 chansons à chaque fois. Chaque morceau que j’enregistre se doit d’être meilleur qu’une chanson que j’ai déjà faite, sinon elle passe aux oubliettes.

Elton John : C’est ce que je dis toujours au gens : « si vous ne comprenez pas le hip-hop, vous avez juste à regardé comment il est enregistré. Je t’ai vu travailler en studio, j’ai vu Kanye West, j’ai vu A Tribe Called Quest. Vous le faîtes tous de manière différente. ça me dérange quand des gens critiquent le hip-hop,car je vois toute la musicalité qui s’en dégage. Aujourd’hui, quand j’écoute un artiste hip-hop, j’entends la production. C’est incroyable de constater comment les beats ont évolué.

Eminem : Avec chaque chanson, tous les éléments doivent être pris en compte. Premièrement, l’instru doit être bonne, tout commence par la musique et ensuite les idées suivent. Après, tu penses aux rimes et après tu enregistres. Parfois même, ça m’est arrivé plusieurs fois, le résultat final ne donne pas ce à quoi tu t’attendais au moment de l’écriture.

Elton John : C’est frustrant quand ça arrive, je déteste ça putain !

Eminem : Oui, parce que t’es excité par tes idées et quand tu entends le résultat final, tu te dis :  « oh mon Dieu, c’est terrible ! »

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Eminem face au hip-hop de 2017

Elton John : Tu écoutes beaucoup de hip-hop actuel ?

Eminem : Ouai, j’écoute vraiment tout ce qui sort.

Elton John : Et selon toi, qui fait les trucs les plus énormes en ce moment ?

Eminem : J. Cole, Travis $cott, Kendrick sont énormes. Mon pote Royce Da 5’9″ est incroyable. Joyner Lucas est très bon, Tech N9ne aussi.

Le freestyle anti-Trump des BET Awards

Elton John : J’adore leurs trucs moi aussi ! Parlons de « The Storm » maintenant, ton freestyle anti-Trump. Tu es l’exemple de quelqu’un qui se bouge le cul et qui dit les choses fortes qui résonnent partout dans le monde. Ce que tu as dit est de très près ce que pensent beaucoup d’artistes eux-mêmes, et j’en fais partie. Tu sentais qu’il était urgent de t’insurger contre ton système ?

Eminem : C’est vraiment quelque chose qui me passionne. Si ce n’était pas le cas, je n’aurais pas pu l’écrire avec mes tripes et ça aurait sonné faux.

Elton John : Permets-moi de te demander : tu as improvisé ou tu as tout écris puis mémorisé ton texte ?

Eminem : Je l’ai écrit. Mon idée de base était de me pointer au BET Awards et de faire ça acapella sur scène. Je suis rentré chez moi pour écrire ce que j’avais en tête et une fois que j’avais fini, j’ai changé mes plans à la dernière minute. On a décidé de tourner à Détroit.

Elton John : Pour le coup je pense que tu as pris la bonne décision.

Eminem : En fait, on voulait faire un truc à la manière de Public Enemy sur « You’re Gonna Get Yours », je sais pas si tout le monde aura la référence, mais c’est à cela qu’on aspirait. Ma principale préoccupation était que le message pénètre tout en mémorisant tous les mots. ça m’a vraiment pris du temps et c’était difficile.

Elton John : Et les gens à l’image avec toi, ils avaient entendu le texte avant le tournage où ils le découvraient ?

Eminem : Non, tous ceux qui étaient présents connaissaient déjà les paroles.

Eminem au sujet de Trump

Elton John : ça se devait d’être dit. Je suis venu en Amérique en 1970 et aujourd’hui, c’est comme ma deuxième maison, mais je n’ai jamais senti le pays aussi divisé. Je ne pensais pas que cela pourrait arriver et ça m’a vraiment brisé le cœur.

Eminem : Il est question d’avoir le droit de se lever contre l’oppression. Je veux dire, c’est exactement la même hose que les militaires et les gens qui ont donné leurs vies pour leur pays. Ils se sont battus pour que tout le monde puisse avoir le droit à la parole et de protester contre les injustices et ce qui ne va pas. Nous ne voulons pas manquer de respect à nos militaires, à notre drapeau et à notre pays, mais c’est la merde et nous voulons que les gens en prennent conscience. On a un Président que se fout de tout le monde dans notre pays. Il n’est pas notre président à tous, mais que celui de certains d’entre nous. Il sait exactement ce qu’il fait.

Elton John : Tout ce qu’il fait est délibéré ?

Eminem : En dehors de sa base de soutien, il en a rien à foutre de qui que ce soit d’autre en Amérique. Mais tu sais quoi ? Nous sommes plus nombreux que les siens. Je pense toujours que notre pays est le meilleur endroit où vivre dans le monde. C’est mon point de vue, mais il y a quand même des problèmes que nous devons régler. Nous devons faire encore mieux.

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Eminem partira-t-il en tournée ?

Elton John : Je sais que tu a fait de nombreux festivals cette année. Tu comptes partir en tournée pour ton album cette année ?

Eminem : Je ne suis pas sûr, on a pris l’habitude de faire seulement quelques dates.

Elton John : Tu aimes partir en tournée ?

Eminem : Avant, c’était difficile. Au début de ma carrière, je n’arrêtais pas. Je faisais parfois deux à trois shows par jour. C’est à ce moment-là que tu as le sentiment de ne plus avoir de vie. Je l’ai déjà dit, je m’amuse beaucoup aujourd’hui sur scène.

Elton John : Le plus difficile, c’est de voyager et d’être loin de chez soi.

Eminem : Oui, c’est dur ça aussi.

Eminem et ses inspirations

Elton John : Quel est le meilleur conseil que tu as reçu et de qui ?

Eminem : Je vais devoir de nouveau dire Dr. Dre. A vrai dire, il m’en a donné plus d’un. Le jour où j’ai signé chez Aftermath, on a beaucoup discuté, notamment sur comment je voulais mettre en avant mon groupe D12. Il m’a dit : « tu dois d’abord construire ton univers avant de laisser entrer tes amis ». Cette phrase a eu énormément de sens pour moi. Il était probablement plus sage d’attendre puisqu’une fois que nous aurions construit Shady Records, il devenait possible de les signer. Il avait aussi l’habitude de dire : « It can be in bad taste as long as it don’t taste bad ».

Elton John : Je ne connais pas Dre. J’ai dû le rencontrer seulement une ou deux fois, mais c’est un peu Obi-Wan Kenobi j’ai raison ?

Eminem : Oui ! Je me souviens aussi de quelques conseils que m’a donnés Rick Rubin. On parlait d’une chanson et il m’a dit  » Je ne me considère pas suffisamment intelligent pour savoir ce que tout le monde va penser d’un morceau, donc je fais seulement ce que je considère bon pour moi ».

Elton John : Sortir un morceau, c’est un peu comme donner naissance à un enfant. Quand certaines personnes de mon équipe balancent des choses avec lesquelles je ne suis pas forcément d’accord, comme par exemple, changer un refrain ou le mettre autre part dans la chanson, ça m’énerve. Mais je garde les remarques dans un coin de ma tête parce que c’est important d’écouter. C’est exaspérant, mais des fois, ils ont raison.

Eminem : Oh, je pense immédiatement à Paul !

Elton John : Paul Rosemberg ?

Eminem : Oui, mon manager. C’est avec lui que j’ai conçu tous mes albums. Parfois, on va dans la même direction, mais des fois non. Souvent, il a raison, mais c’est vrai que parfois c’est difficile d’accepter les critiques quand tu as passer beaucoup de temps à bosser sur quelque chose, qu’il s’agisse d’écrire, de choisir le beat, de réfléchir à comment poser sa voix ou d’enregistrer. Tu passes une putain de semaine à faire quelque chose de parfait et quelqu’un vient casser ton délire.

Elton John : Je pense que tu as de la chance d’avoir quelqu’un comme lui.

Eminem : Absolument. Parce que comme j’ai dit, on fini toujours par tomber d’accord à la fin. Quand je lui ai présenté « Not Afraid » la première fois, il n’était pas fan du morceau. Après quoi, on a eu une discussion et il m’a dit : tu penses vraiment qu’il y a besoin d’un bridge ? J’ai répondu : « j’étais sûr que tu dirais ça ».

Elton John : Un bon manager est la chose avec le plus de valeur que l’on peut avoir en tant qu’artiste, parce que, comme tu dis, parfois, on manque de recul sur certaines choses. Je pense que, en plus de ton talent, si tu as une telle carrière, c’est aussi grâce aux gens qui sont derrière toi.

Eminem : Absolument.

Le mot de la fin

Elton John : Quand ton album sortira, les gens voudront l’écouter. C’est un hommage à ta longévité artistique, ton intelligence, ta brillance musicale et lyricale. Je suis tellement heureux que tu existes dans ce monde et je suis tellement fier de toi. Tu as travaillé tellement dur sur toi-même et personne n’a plus de mérite que toi Marshall. Je t’aime, et ce depuis très très longtemps d’accord ?

Eminem : Merci Elton, je t’aime aussi.

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