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Passalacqua : "le Hip hop est le genre musical le plus adapté pour raconter des histoires" Passalacqua : "le Hip hop est le genre musical le plus adapté pour raconter des histoires"

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Passalacqua : « Le Hip hop est le genre musical le plus adapté pour raconter des histoires »

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2HIF a rencontré Passalacqua, groupe originaire de Détroit composé de Bryan et Brent aka Mister et Blaksmith. Les deux MC seront de passage en France dans le cadre du Festival Les Escales à Saint-Nazaire.

Le groupe Passalacqua est originaire de Detroit. Il fait partie de la scène émergente issu du collectif local Assemble Sound. Quand Detroit ou « The D » renaît de ses cendres, la musique, elle aussi, se renouvelle, en particulier la scène Hip Hop. Nous avons eu l’occasion d’échanger avec Bryan et Brent aka Mister et Blaksmith. Les deux artistes et MC’s se produiront pour la première fois en Europe et en France, à l’occasion du Festival Les Escales à Saint Nazaire. Dans cet entretien, ils évoquent leur musique, la scène locale vue de l’intérieur, et portent un regard critique, mais toujours bienveillant, sur les changements de cette ville emblématique.

2HIF : Hello Passalacqua : Pour commencer, qui êtes-vous et comment avez-vous démarré dans la scène Hip hop à Detroit ?

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Brent aka Blaksmith : Je suis Brent, aka Blaksmith et Bryan (aka Mister) est le deuxième MC de notre groupe, Passalacqua. On évolue à Detroit au sein de la scène Hip-hop depuis 2007. On a tout les deux 30 ans et le groupe existe depuis 2011.

Bryan aka Mister : Mon premier projet s’appelait Cold Men Young, en référence au nom du premier maire afro-américain de Detroit, Coleman A. Young. Les deux groupes ont une certaine notoriété ici à Detroit mais je suis ravi d’annoncer que nous jouerons en France cet été, et pour la première fois en Europe !

La musique de Detroit a toujours été avant-gardiste, et elle est restée authentique.

2HIF : Comment vous-situez vous par rapport à la très riche histoire musicale de Detroit, et le Hip hop ?

Brent : La ville est connue pour son esprit de communauté et son histoire musicale est marquée par des groupes comme Slum Village, The White Stripes, ou bien le mouvement Techno. On cite souvent Eminem et le son de la Motown, mais l’histoire du Hip-hop à Detroit est tout aussi singulière, et on ne peut pas vraiment la résumer en listant les quelques noms des artistes les plus connus.

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Bryan : Je me suis toujours senti connecté à la lignée musicale propre à la ville. J’aime savoir d’où elle vient et où elle va. La musique de Detroit a toujours été avant-gardiste, et elle est restée authentique. Si elle ne l’est pas, les gens le savent et ne vous laissent aucune chance ! Cette particularité pousse à peaufiner la musique que l’on produit. Tu dois vraiment faire quelque chose d’extraordinaire pour capter l’attention ici. A Detroit, on peut aller à un concert tous les jours, donc nous sommes de vrais enfants gâtés !

2HIF : Quelle a été votre contribution au formidable projet Assemble Sound dans le quartier de Corktown, cette église transformée en lieu de résidence et en studio d’enregistrement sur le mode collectif ?

Brent : Assemble Sound a été créé en 2014. C’est la nature collaborative du projet et le nouveau souffle que prenait alors Detroit qui a permis à Assemble Sound de se développer et de gagner en réputation. Avec notre groupe Passalacqua, nous avons lancé les premiers concerts, nous avons fait jouer les groupes locaux Flint Eastwood (également présent au festival Les Escales, ndlr) Tunde Olaniran, ou encore Bev Love. Quatre années se sont écoulées et aujourd’hui Assemble Sound est un endroit parfait pour enregistrer sa musique en studio avec de jeunes producteurs. La structure propose aussi des cours autour du management d’artiste
et de la production musicale.

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Bryan : En 2014, nous avons sorti CHURCH avec Jax and Seth Anderson (Flint Eastwood, et SYBLYNG). Nous avons participé à la création d’Assemble en commençant par organiser des concerts qui ont eu pas mal d’écho dans le coin. Ensuite, avec les principaux porteurs du projets, nous avons commencé à discuter d’un lieu commun et permanent pour permettre aux groupes de Detroit de se lancer sur le mode professionnel. Aujourd’hui, nous continuons à travailler tous ensemble.

Il est très important que notre musique, et ses textes, reflètent quelque chose d’honnête.

2HIF : Parlons un peu de votre musique, quelle est l’importance des textes dans votre Hip hop ?

Brent : Les paroles comptent beaucoup. Je pense que le Hip hop est le genre musical le plus adapté pour raconter des histoires et interpeler un auditeur avec des mots. Avec tout ce qui se passe à Detroit depuis très longtemps – je veux parler de la faillite, du phénomène de gentrification et de la violence -, il est très important que notre musique, et ses textes, reflètent quelque chose d’honnête. Mais je pense qu’on fait ça bien !

2HIF : Comment avez-vous connu Corktown, ce quartier plein d’énergie et d’initiatives, et la scène Hip hop de Detroit ?

Brent : Je n’ai pas grandit à Corktown, j’ai grandit dans la banlieue un peu à l’extérieur de la ville. Après le Bac, j’ai intégré l’université à Detroit et j’ai alors connu sa scène musicale et culturelle. A cette époque, Corktown était une plaque tournante pour le Hip hop avec la salle 5E Gallery (gérée par les DJ’s Sicari et Piper Carter, ndlr). On y célébrait alors les cinq éléments majeurs du Hip hop : le rap (Emceeing dans le texte, ndlr), la breakdance, le graffiti, le Djing et les valeurs de connaissance et de tolérance. Ce lieu m’a vraiment introduit à la vaste culture Hip hop de Detroit. Je me souviens des performances incroyables de Black Milk & Phat Kat… Malheureusement, la salle a fermé en 2013 et la communauté a été écartée avec comme prétexte, la « revitalization » (la volonté de la municipalité de restructurer et de donner un nouvel élan économique à Detroit et ses quartiers ndlr). J’ai habité à Corktown et malgré ses belles boutiques et ses restaurants, il y a vraiment un fossé entre ce quartier et les autres, moins favorisés. On porte beaucoup d’attention à Corktown, qui a une population plutôt jeune, fortunée et blanche, mais ce n’est pas la fidèle représentation de Detroit dans son ensemble.

Bryan : Brent connaît beaucoup mieux le contexte que moi…J’ai grandit au même endroit que Brent, à l’extérieur de Detroit mais j’ai ensuite quitté le Michigan pour quelques temps, puis je suis revenu au moment où la ville commençait à changer, et à faire son grand retour. Des quartiers comme Corktown et Downtown brassent beaucoup d’argent, alors que d’autres quartiers peinent à bénéficier d’un éclairage public qui fonctionne. Je souhaite juste que ce développement puisse s’étendre aux quartiers qui en ont le plus besoin dans les années à venir.

2HIF : Pourquoi ce haut-lieu de la scène Hip hop a-t-il disparu, la 5E Gallery ?

Brent : En fait, je dis juste que ce qui était un bon exemple de lieu célébrant une véritable culture où les gens pouvaient s’exprimer de façon bienveillante est aujourd’hui un magasin de vélo… Avant le projet Assemble Sound, il y avait la 5E Gallery qui allait aussi dans le sens de cet esprit collaboratif… Par exemple, le cofondateur Piper Carter a beaucoup oeuvré pour promouvoir les femmes au sein de la scène Hip hop. Mais le mouvement est encore bien vivant même si physiquement, ce lieu n’existe plus puisqu’il a été fermé…Je pense que cette fermeture est due en partie à une mauvaise réputation, et que cela a aussi quelque chose à voir avec le milieu des affaires à Corktown, qui ne comprend pas qu’il est essentiel d’avoir des lieux ouverts pour donner un écho à la culture Hip hop de Detroit.

Ces gosses maîtrisent clairement le langage et les bases du Hip-hop et oui, il a un gros public ici à Detroit !

2HIF : Aujourd’hui, quels sont les lieux qui célèbrent le Hip hop à Detroit et que vous conseillez ?

Brent & Bryan : Il y des lieux comme The Baltimore Gallery, The Old Miami, et Bob’s Classic Kicks, par exemple…

Est-il juste de dire qu’à Detroit, le Hip hop est roi ? Et qu’il a toujours beaucoup de succès auprès des jeunes ?

Brent : A Detroit, je suis aussi enseignant dans une école de l’Eastside et j’observe que la culture Hip hop est dominante. Piper Carter que j’ai déjà mentionné propose d’ailleurs des actions pédagogiques autour du Hip hop. Il y a par exemple le Dilla Youth Day. Ces gosses maîtrisent clairement le langage et les bases du Hip hop et oui, il a un gros public ici à Detroit !

Vous serez bientôt en France !

Brent : Oui, tout comme notre musique, tout ça est bien réel ! Et vous savez, la couverture de notre premier album a été réalisée par un graphiste français, donc, la boucle est bouclée !
Bryan : On est super impatients de venir vous montrer notre performance en France, et pour la première fois. Je sens que ce voyage est le premier d’une longue série…

Découvrez Banglatown EP, le dernier projet des deux MC ci-dessous.

Propos recueillis et traduits par Marjolaine Casteigt

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