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Est-ce que, 10 ans après, le rap « emmerde » toujours le Front National ?

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Est-ce que, 10 ans après, le rap "emmerde" toujours le Front National ?

Près de dix années après, le titre « Marine » de Diam’s semble n’avoir jamais autant caressé l’actualité. Et pourtant, son message semble s’être essoufflé.

« Je ne suis pas de ceux qui prônent la haine, plutôt de ceux qui votent et qui espèrent que ça s’arrête ». 2006. Dans un morceau poignant, Diam’s dresse le portrait d’une France déchirée par la montée du Front National tout en s’inquiétant de son nouveau visage, celui de Marine Le Pen. En effet, en 2007, Jean-Marie Le Pen effectue sa dernière danse politique avec un faible score de 10%, avant de céder la place à sa fille. Mais cinq ans après la claque de 2002, Diam’s reste lucide et conclue :

« J’ai peur que dans quelques temps t’y arrives, et que nous devions tous foutre le camps ».

Un désamour légendaire

Historiquement, les valeurs prônées par le FN se trouvent à des années lumières du rap. Quand celui-ci livre un message de liberté et d’émancipation tout en soulignant l’importance de l’immigration, l’extrême droite se nourrit des idées qu’on lui connaît. Voilà pourquoi la famille Le Pen et son parti ont souvent été la cible d’attaques directes et orchestrées. Mise à part Diam’s, de Sniper à Youssoupha en passant par Booba et Nekfeu, nombre de rappeurs ont piqué au vif le Front National. Pourtant, alors que le parti pointe son nez au second tour des élections présidentielles, aucune réaction assumée n’est venue se positionner clairement contre Marine Le Pen et ses pairs.

Peut-être est-ce la faute à une campagne électorale sans queue ni tête, alimentée d’affaires nauséabondes ? Peut-être est-ce la faute à un Emmanuel Macron pas non plus irréprochable et dont l’image du banquier véreux semble, elle aussi, l’éloigner des valeurs du rap ? Peut-être est-ce la faute à ces valeurs elles-mêmes, plus tendres, plus souples, agrémentées d’une sorte de « dépolitisation » du rap ? Ou, peut-être, est-ce parce que les sondages n’ont jamais masqué la présence du Front National au second tour et que, quelle qu’en soit l’issue, les Français s’y attendaient ? Tant de questions qui restent en suspens et qui égratignent l’image d’un rap politiquement opposé à l’extrême droite.

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Le calme avant la tempête ?

Rares ont été les réactions des rappeurs à l’annonce du tandem final. Même Youssoupha, d’habitude si engagé, s’est fendu d’un tweet à mi-chemin entre humour et satire. Lui qui écrivait que le « rock avait perdu ses couilles » dans un « Menace de Mort« si criant, se contente d’une simple allusion au footballeur Kylian Mbappé. Evidemment que Youssoupha ne tolère pas les idées du FN, mais sûrement que la haine nourrit depuis tant d’années s’est peu à peu muée en désespoir moins démonstratif. C’est, globalement, le sentiment qui ressort d’une France qui, chagrinée, ne sait plus pour qui voter, ni pour quoi. Et, dans ce sens, dix ans après, les paroles de Diam’s prennent tout leur relief.

Pourtant, même pour Donald Trump, les MC’s français se sont montrés bien plus expressifs. La faute au syndrome de l' »après-coup » ? Celui qui incite à la réaction seulement une fois que le mal est fait ? Il y a des chances. De manière générale, le monde fonctionne dans cette ordre d’idée désormais. Bonne ou mauvaise chose, là n’est pas le propos. Là n’est pas le propos non plus d’inviter à un soulèvement unanime qui ne ferait qu’alimenter les théories fumeuses qui entourent le FN et ses idées. Disons simplement que quinze ans après une révolution populaire dans les rues, tout est bien trop calme.

Marine Le Pen est passée au second tour et le rap est resté profondément muet. Peut-être parce qu’à crier qu’il « emmerde le Front National » depuis dix ans, il s’en est définitivement lassé.

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